Le GR20 – Fra li Monti
Un peu d’histoire…
Jean Loiseau, architecte à la Banque de France, est un passionné de nature et de marche. C’est le scoutisme qui lui en a donné le goût.
Après la guerre de 14-18, il crée un groupe de marcheurs « les Compagnons Voyageurs » et va parcourir avec eux, pendant des dizaines d’années, les chemins de France et d’Europe. Ils ont un atout précieux : ils savent se repérer en pleine nature avec cartes et boussoles.
Le mot « randonneur » n’a pas encore été inventé. Les marcheurs, nettement moins nombreux qu’aujourd’hui, sont appelés des excursionnistes, des touristes pédestres ou des promeneurs.
Jean Loiseau ébauche alors le projet de créer en France des « grandes routes du marcheur » avec le Camping Club de France.
Quelques années plus tard, en 1945, le projet est présenté au Touring Club de France, les premières règles de signalisation (balisage composé d’un trait rouge surmonté d’un trait blanc) sont adoptées et les premiers bénévoles recrutés au sein des associations créatrices. En 1947, plusieurs tronçons des futurs GR sont en chantier et les « grandes routes du marcheur » se transforment vite en « sentiers de grande randonnée ». Le mot « randonnée » est lancé, et celui de « randonneurs » avec.
En 1947 est créé le Comité National des Sentiers de Grande Randonnée (CNSGR) et on inaugure le premier tronçon du GR3. En 1951, le GR Tour du Mont Blanc est réalisé et l’année suivante, les sentiers GR sillonnent près de 1000 km.
Le réseau des GR va couvrir au fil des années toutes les régions de France et les randonneurs sont de plus en plus nombreux à les parcourir. Il faut donc les représenter : c’est ainsi que nait la Fédération Française de la Randonnée, le 22 avril 1978.
Historique du GR20
Le GR20 est l’un des 369 chemins de Grande Randonnée dits « GR » qui sillonnent la France aujourd’hui.
«Figurez-vous un monde encore en chaos, une tempête de montagnes que séparent des ravins étroits où roulent des torrents; pas une plaine, mais d’immenses vagues de granit et de géantes ondulations de terre couvertes de maquis ou de hautes forêts de châtaigniers et de pins.» C’était en 1880, dans les montagnes corses, au cœur de ce qui deviendra le plus beau sentier de randonnée d’Europe, le fameux GR 20. Guy de Maupassant s’était offert le voyage de sa vie grâce aux droits d’auteur de Bel-Ami…
Imaginé dans les années 60 pour tout au plus 15 personnes par an, le GR20 accueille aujourd’hui environ 20 000 randonneurs annuels. Considéré comme le plus difficile des GR français, il parcourt la Corse du nord au sud par la ligne de partage des eaux. Il part du village de Calinzana, au dessus de Calvi et aboutit à Conca, près de Portivechju.
Le niveau est nettement sportif, le confort dans les refuges, aujourd’hui encore, est rustique. C’est un parcours difficile, technique, qu’il ne faut pas entreprendre sans s’y être fortement préparé.
Au départ, le GR20 a été conçu dans un esprit sportif, le circuit est spartiate et se pratique en autonomie. On parle d’une « randonnée difficile pour décourager les curieux », «une sélection par l’effort physique dans un but de protection de la nature». Dans le nord, le terrain est très alpin avec des passages équipés aujourd’hui de chaines et de cables où on ne peut plus parler de randonnée.
Il s’est adressé pendant longtemps à un public averti de montagnards, capables de porter des sacs dépassant les 25 kilos. En effet, les ravitaillements se faisaient uniquement dans les villages, il fallait redescendre vers les vallées se ravitailler ou partir en autonomie et porter le nécessaire pour tout le circuit. Les refuges étaient gérés par le Parc Régional et ses agents. La vente de nourriture y était interdite.
Depuis sa création, et contre toute attente, l’engouement pour ce sentier a été immédiat. Le bouche-à-oreille aidant, le nombre de randonneurs a augmenté sans discontinuer. Jusqu’à exploser dans les années 2000. La fréquentation des refuges et des aires de bivouac autorisées a plus que décuplé en 10 ans : en 2003, le GR20 enregistre près de 400 000 nuitées officielles, contre 37 000 en 1993. A partir des années 90, le GR20 est devenu cette haute route à la mode, reconnue comme l’un des plus beaux « treks » du monde. Les raisons sont nombreuses, mais la principale est l’explosion de la randonnée pour des personnes de plus en plus sédentarisées dans leur vie.
Depuis quelques années on trouve dans les refuges tout le ravitaillement nécessaire, les repas du soir, les petits-déjeuners, les boissons (café, vins, bières) et les pique-niques du lendemain. En diminuant le poids des sacs, le GR20 est devenu plus accessible que par le passé, mais il reste un parcours à caractère sportif marqué. Il est devenu la « vitrine de la montagne corse » et est parcouru chaque année par quelques 15000 à 20000 personnes.
Les grandes dates de l’histoire du GR20
- 1952 : Jean Loiseau édite « Itinéraires de Corse » un recueil de parcours de montagne recouvrant une bonne part de l’actuel GR20.
- 1965 : Guy Degos, infatigable randonneur et ingénieur des forêts à la Direction Départementale de l’Agriculture, imagine de relier Calvi à Porto-Vecchio le long de la ligne de partage des eaux et propose de confier au CNSGR l’étude d’un itinéraire de traversée de la Corse du nord au sud par les principaux massifs de l’île.
L’étude est réalisée par Michel Fabrikant. Il s’y emploiera inlassablement en redécouvrant des tracés que Jean Loiseau avait établis quinze ans plus tôt et rassemble son travail dans le « Guide des montagnes corses ».
- 1970 : Michel Fabrikant et des équipes de bénévoles réalisent le premier balisage du sentier. Le GR20 est né ! On lui donne ce numéro en référence à celui de l’ancien département de Corse.
- 1971 : Construction des 2 premiers refuges : Petra Piana et Campiglione.
- 1972 : Création du Parc Naturel Régional de Corse. Dans un scepticisme général et grâce à la volonté de François Giaccobi, premier président du Parc, les premiers crédits nécessaires à la réalisation du GR20 sont attribués et la nouvelle équipe se lance dans l’équipement du sentier : aménagement de passages, passerelles, panneaux de signalisation.
Edition du premier guide du GR20.
La mise en place des hébergements se fera progressivement : il faudra près de 15 ans au PNRC pour construire les 13 refuges actuels.
Création du Parc Naturel Régional de Corse
L’histoire du GR20 est intimement liée aux années soixante dix, qui sont pour la Corse des années charnières, de revendications régionalistes, environnementales et culturelles. C’est à cette période que va naître le Parc Naturel Régional de Corse (PNRC) le 15 mai 1972.
Cette création est l’aboutissement d’une démarche initiée pour pallier à la désertification des villages et de l’intérieur de l’île en général. Le but étant la mise en valeur des anciens chemins de transhumance ou inter villages pour relancer le pastoralisme d’estive, mais aussi le développement d’un tourisme que l’on appelle aujourd’hui : tourisme vert.
Aujourd’hui, le PNRC regroupe 145 communes, 26 700 habitants et 350 510 hectares, soit près de 2/3 de l’île. C’est l’opérateur de la randonnée pour l’île. A ce titre, il gère les grands itinéraires dont le GR20 (tracé, entretien, balisage, signalétique, refuges).
© Magali Vermeglio – Altre Cime
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